jeudi 19 septembre 2013

Avoir un faible pour les hommes violents

Vous faites ça le jour de paye ou juste avant la fin de semaine. Vous gâchez les anniversaires, les vacances. Ça saute toujours au plus mauvais moment. Justement quand on pensait que ça allait mieux. On se prend une belle volée et on se dit qu'on aurait dû prévoir. je sais que j'ai toujours pris beaucoup trop de responsabilités. Quand j'avais douze-treize ans, les intervenants voulaient absolument me convaincre que je n'y étais pour rien si papa était comme ça. Depuis ce temps-là, y a deux ou trois choses que je supporte mal. Les lumières éteintes et les rideaux tirés l'après-midi. Des odeurs, des sons comme la ceinture qui claque ou la règle de bois sur le mur pour me terroriser.

Appeler l'ambulance, suspendre les droits de quelqu'un pour le faire entrer en psychiatrie ou le faire arrêter, je faisais déjà ça quand j'avais douze ans. Quand papa faisait le bacon pour attirer mon attention. Quand il restait couché à fixer le vide et ne me répondait pas. Quand il ne s'occupait pas de moi comme une enfant de douze ans peut s'y attendre ou quand il me frappait parce qu'il était soûl. Alors j'appelais la police, l'ambulance. Je voulais qu'il comprenne qu'il n'agissait pas correctement. Après ça, toute la famille m'en voulait parce que je me laissais pas manipuler. Je lui disais ça à papa, "tu me manipuleras pas". Ma mère était jalouse de moi.

Tu me regardais avec l'air du gars qui le sait qu'il est en train de pousser sa luck, mais tu pouvais pas t'en empêcher. Ça j'ai compris ça. Vous voulez pas vraiment me faire de la peine, vous voulez que j'aie de la peine avec vous. Tu le savais que j'étais pas contente, de la litière pas faite, des lumières et des rideaux fermés, de l'odeur de vidange qui flotte partout, du linge sale mêlé au linge propre, du fait que je travaille comme une folle et tu ne cuisines jamais. Tu m'as demandé de l'argent. Tu le sais comment j'aime ça parler d'argent quand ça fait quinze minutes que j'ai fini de travailler. T'en manques pas une. Tu m'as dit que tu avais cinq piastres, tu m'as demandé si je voulais aller avec toi au Dairy Queen. T'as dit que t'aurais besoin de dix piastres pour des clopes. Mais t'as juste cinq piastres et t'as pas mangé de la journée alors, tu m'offres d'aller te regarder manger une crème glacée alors que j'arrive de travailler et que je suis affamée. Parce que je veux pas, tu claques la porte. Tu reviens et tu refuses de me parler. T'es dans un état léthargique, couché en posistion foetale, tu fais comme si tu ne m'entendais et ne me voyais pas. On pourrait penser que tu ne vas pas bien, mais au-delà de ça, il y a ton désir de me transférer ton malaise, en jouant la comédie. C'est pas full pacifique comme tactique.

Je peux pas croire que c'est pas de ma faute. Je t'ai choisi différent de lui et tu fais pareil alors ça ne peut être qu'à cause de moi. Et j'appelle des ambulances en te criant que tu me manipuleras pas et je ramasse ce que tu as brisé, je moppe le sang parce que t'as fait semblant de vouloir te tuer et j'ai peur d'en parler parce que personne ne va me comprendre.

J'ai très besoin d'un homme gentil ce soir. Pour changer. Demain je vais aller te chercher après ta comparution, bien entendu.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire